Podor est aux portes de l’Ile à Morphil.
L’ïle à Morphil est une grande bande de terre plus ou moins marécageuse, enfermée entre le fleuve Sénégal au nord et le marigot du Doué au sud, qui conserve des villages typiques.
Leurs mosquées anciennes, construction en terre centenaires, sont le témoignage de l’empire Toucouleur constitué par El Hadj Omar Tall, natif d’Alwar.
Morphil signifie : défense d’éléphant. Autrefois, il y avait des éléphants dans la région et, sur l’île, un cimetière d’éléphants. D’où le nom qui lui a été donné.
Légende
36 – Podor, le fort 37 – Podor, les Quais 38 – Île à Morphil, la mosquée de Donaye
39 – Île à Morphil, la Mosquée de Guédé 40 – Île à Morphil, Maison natale d’El Hadj Omar Tall
41 – Île à Morphil, la Mosquée d’Alwar 42 – Île à Morphil, la Mosquée de Mboyo
43 – Médina Ouro-Mahdyou, le Mausolée
Cette région est encore très authentique avec son habitat en banco et ses traditions fortement ancrées. Elle est parsemée de vestiges d’une histoire mouvementée au cours de laquelle Islam et colonisation se sont confrontés.
Un parcours thématique permet de découvrir les vestiges de ce passé toujours bien conservé par la tradition orale, un art de vivre et un artisanat encore très marqué par les coutumes.
Un fort, une escale
- Dès 1744, les français occupent le site de Podor avec la construction d’un premier fort par le gouverneur de la concession du Sénégal, Pierre Barthélémy David, au profit de la Compagnie des Indes.
- 1758-1783 : occupation du site par les anglais, puis abandon du fort tombé en désuétude suite à la décadence du commerce.
- 1853-1854 : expédition militaire dans le Fouta pendant laquelle Podor est prise d’assaut.
- en mars 1854 le drapeau français flotte sur les ruines de l’ancien fort.
- Du 27 mars au 1er mai, le capitaine de génie Faidherbe restaure l’enceinte et l’équipe de baraquements provisoires en attendant la construction des bâtiments intérieurs vers 1860. Devenu général, Faidherbe, promu par deux fois gouverneur du Sénégal, laissera une profonde empreinte encore reconnue aujourd’hui.
Ce Fort assurait la mainmise militaire et administrative des français sur le Fouta.
Il permit aussi aux commerçants St-Louisiens et aux négociants européens de développer l’Escale, au sud du Fort. En bordure du fleuve, c’était un alignement de maisons aux murs ocres, faisant face à la Mauritanie et ouvertes à l’arrière sur la rue commerçante. Aujourd’hui, le long des quais empierrés, à l’ombre des cailcédrats centenaires, ce quartier original et majestueux témoigne de l’importance exceptionnelle du commerce traditionnel de mil, gomme arabique, ambre, venus de Mauritanie par caravanes.
Les produits étaient ensuite chargés sur les bateaux qui redescendaient le fleuve jusqu’à St-Louis, d’où l’expression « Podor entre caravelles et caravanes ».
Mémoire et Traditions Tioubalo
A cinq kilomètres environ de la ville de Podor, face à la Mauritanie, Ngawlé est un village musée construit en banco. Site ombragé au bord du fleuve Sénégal, Ngawlé garde encore ses traditions et préserve les valeurs authentiques du peuple Toucouleur.
A coté de revenus agricoles, les habitants ont su conserver des techniques de pêches ancestrales et une organisation sociale particulière, où le pouvoir de décision relève d’un conseil de sages dirigé par le chef de village.
Les habitants sont avant tout des pêcheurs, « Tioubalo » en langue halpulaar. L’eau et la terre sont liées à l’origine du village et à la personnalité de son fondateur : le célèbre pêcheur Moussa Boukari Sarr. Les exploits de ce dernier et ceux de sa fille, la mystérieuse Penda Sarr, sont l’objet de récits oraux qui mettent en exergue une connaissance mystique des « génies » du fleuve, incarnés en caïmans, lamentins ou hippopotames.
La fête du « pekan » demeure l’une des spécialités du village de Ngawlé. Pékan signifie littéralement « montre ce dont tu es capable ». Il s’agit de chants poétiques déclamés par des initiés ayant une connaissance ésotérique avérée de la nature et des secrets du fleuve. . Ces soirées sont l’occasion de confrontations de savoir entre plusieurs familles. Elles s’organisent sur la place du village en période faste, généralement à la fin des récoltes.
Artisanat et Société Traditionnelle
La société halpulaar est basée sur une hiérarchie très marquée, présentée comme un ordre naturel.
La population se divise en deux grands groupes :
- les « Rimbés » ou nobles
- et les « Rimbaybés » ou non-nobles c’est à dire les castes. Subsistent également encore les « Matioubés », attachés au service des familles d’anciens maîtres.
Comme dans plusieurs sociétés traditionnelles, la caste renvoie à un métier et à des pratiques. Elle explique souvent le comportement et les aspirations de l’individu et détermine les rapports entre les différentes strates de la société. Ces liens sont relativisés dans les villes mais demeurent encore vivaces dans les campagnes où artisans et griots sont les garants de la tradition.
Dans la région de Podor, l’artisanat très présent produit des objets traditionnels avec un outillage rudimentaire compensé par des savoirs-faire transmis de génération en génération.
- Les cordonniers fabriquent babouches, nu-pieds, bottes, étuis de couteaux, frondes, … à partir des peaux tannées et parfois teintées.
- Les tisserands utilisent un métier à tisser en bois appelé « maaba » et des fils de toutes les couleurs pour réaliser des bandes de tissus aux motifs anciens ou d’inspiration propre. Ces bandes sont ensuite vendues aux teinturières et aux couturières qui les assemblent pour confectionner des habits de fête.
- Les teinturières recouraient autrefois à l’emploi de plantes: indogotier, noix de cola, écorces d’acacia séal, graines d’arachide, pour colorer les tissus. De plus en lus souvent, elles utilisent des couleurs synthétiques aux teintes plus variées. Elles achètent également des tissus blancs à Dakar ou en Mauritanie voisine, et pratiquent la sérigraphie, le batik d’art, le tampon en guise de décoration. L’originalité et la qualité du travail différencient les groupements.
- Les potières se servent de la terre pour produire des canaris, des pots et des encensoirs. Le mode de fabrication est dit « au colombin », sans moulage préalable du fond. La décoration est propre à chaque famille.
A Ndiayène Pendao, village situé entre les dunes à quelques kilomètres de Taredji, les femmes proposent des nattes de roseau qu’elles ont ingénieusement tressées avec des fines lanières en cuir selon la coutume maure.
Des Mosquées Omariennes et une Histoire mouvementée
Le Fouta a été le théâtre de la résistance des Toucouleur à la colonisation et certains villages sont célèbres, soit par des faits historiques qui s’y sont déroulés, soit par des chefs locaux qui y ont vécu et qui se sont illustrés dans la contestation.
Un des plus célèbres résistants fut El Hadj Omar Tall. Il se lance dès 1854 dans une longue guerre contre le colonisateur français. Il crée l’empire Toucouleur et installe son fils Ahmadou en 1859 sur le trône de Ségou. Natif d’Alwar en 1794, il meurt en 1864, on peut y voir sa maison natale et la chambre de retraite spirituelle où il s’isola avant d ‘appeler à la conquête.
Cheikh Amadou né Amadou Mahdyou Bâ, dont le diminutif est « Mahdi », fut un réformateur religieux, contemporain d’El Hadj Omar. Il se sentit investi de la mission de combattre « les hypocrites qui collaborent avec les français ». Il créa le village d’Ouro Mahdyou.
Dès le début du XIXème siècle. Les Toucouleur s’opposèrent aux convois français sur le fleuve et leur hostilité retarda la colonisation. A partir de 1852, les habitants de Dimat, un des villages les plus anciens du Fouta, résistèrent aux troupes de Faidherbe. Au cours d’une de ces batailles, les Toucouleur s’emparèrent de quelques canons qu’ils enterrèrent dans le cimetière. Il en reste encore un sur la tombe de l’Almami Emimane Seydou Kane, fondateur du village. Plus anciennement, au XVème siècle, Guédé, du fait de sa position stratégique, était la capitale du Toro où l’on couronnait les rois Lam Toro.
Au cœur des villages en terre de l’île à Morphil, les ruelles étroites s’entrelacent jusqu’à la mosquée omarienne construite en brique de terre séchée et recouverte d’un crépi de même matériau, en parfaite harmonie avec l’architecture locale. Le plan d’une mosquée omarienne est celui d’un bâtiment rectangulaire dont les angles et quelques fois le milieu des façades sont constitués de contreforts massifs dépassant en hauteur le toit en terrasse et rappelant la forme en obus du style soudannais. Le minaret, également en brique, surmonte le toit. Ces édifices plus que centenaire, d’entretien difficile, ont été détruits pour la plupart. Heureusement quelques-uns ont résisté aux aléas du temps.
- La mosquée d’Alwar est considérée comme la plus ancienne du Fouta. Elle fut construite vers la 2ème moitié du XVIIIème siècle. C’est là où venait prier El Hadj Omar Tall, natif des lieux.
- La mosquée de Donaye, la plus grande de toutes, fut édifiée vers 1870 par les Toucouleur revenus au pays après la chute de leur empire.
- La mosquée de Guédé, plus rafinée, présente des tourelles d’angle au sommet conique et des linteaux de porte décorés de dessins géométriques.
- La mosquée de Mboyo est également d’une architecture apprentée à celles des mosquées de la boucle du Niger.
- Plus loin, à Wouro Mahdihou, Amadou Maydyou Bâ repose dans un mausolée d’inspration marocaine.


















